David GilmourDavid GILMOUR
-
Rattle That Lock
Rock Progressif
Chronique publiée en Juin 2022
Au moment où j'écris ces lignes, «Rattle That Lock », sorti en 2015, est le dernier disque studio de David Gilmour, que ce soit en solo ou avec Pink Floyd.
C'est un album en particulier connu en France pour son utilisation du jingle de la SNCF : l'artiste était tombé sous le charme de ces quelques notes en 2013, lors d'un voyage dans l’hexagone. Il décide alors d'en faire un morceau ! Et ceci en faisant bien les choses : contact de l'auteur, partage des revenus, participation au processus d'élaboration... Bref, tout était réuni pour en faire une superbe success story... Avant que l'auteur en question revienne sur son accord et attaque Gilmour en justice... Je ne connais pas les raisons fondamentales ayant poussé à un tel extrémisme (ce qui est évoqué dans les articles semble tellement dérisoire)... Mais c'est en tout cas bien triste... De son côté, évidemment, le légendaire guitariste gagne le procès... Et de l'autre côté de la barre, ce qui aurait été une merveilleuse histoire se transforme en image malsaine... Enfin... Chacun ses choix...
Pour en revenir à la chanson concernée, "Rattle That Lock"... Ben... A vrai dire... Pour un auditeur français, je dirais que le début sonne un chouille bizarre... On a tellement l'habitude d'associer ce fameux jingle aux trains et aux gares qu'on a un peu de mal à rentrer dans la musique... Au bout d'un moment, néanmoins, la sensation du jingle s'efface et laisse place à une composition plutôt agréable, mais pas géniale non plus... On parlera de mise en jambe avec quelques sonorités typiques de l'artiste, dont un solo bien construit...
Dans un style Rock relativement similaire, "Today", en fin de disque, sera d'ailleurs nettement plus réussi.
On rentre vraiment dans le dur de l'album avec les deux morceaux qui suivent "Rattle That Lock".
"Faces of Stone" est très caractéristique du bonhomme, très Floydien... Planant... Enveloppant... Avec un air musical astucieux et pénétrant... La Stratocaster et le clavier se marient à merveille sur le final, dans un moment aiguisé et élancé...
... Quant à "A Boat Lies Waiting"... Vous y êtes, vous aussi ? Adossé au piano du bar... Au bord de la mer... Pour profiter d'un instant de paix et de recueillement dont rien ne saurait troubler la tranquillité...
Gilmour se permet une variation des genres avec "Dancing Right in Front of Me" et "The Girl in The Yellow Dress". En ressort une proximité très marquée avec le chanteur et un côté jazz qui à mon avis fonctionne beaucoup mieux sur le premier que sur le second morceau... Second morceau qui est volontairement très décousu, avec peut-être un rendu assez bien foutu pour un amateur du genre, mais qui ne cadre pas avec mes goûts personnels.
... Et oui... Mais... le morceau véritablement exceptionnel... Le voilà, planté au milieu du disque... "In Any Tongue"... Un thème grave sur la bêtise de la guerre... Qui forcément refait fortement écho aujourd'hui avec l'absurdité totale des évènements en Ukraine...
Et malgré tout... Un passage éblouissant... Une sorte de résurrection de l'âge d'or de Gilmour... Une merveille de composition où l'artiste laisse éclater tout son génie... Sans surcharger l'ensemble, mais avec ce qu'il faut, là où il faut, pour que le temps se fige et ne devienne plus qu'une mélodie phénoménale et saisissante...
Les arrangements louvoyant en arrière-plan sont magnifiques... Les poussées de grave s'emparent de nous lors des refrains... La Fender s'approprie le Lead pour le solo final, sublimé par quelques notes de clavier, simples et géniales...
Le tout provoque le grand frisson... Les poils se hérissent... L'instant est beau à en pleurer tant il parvient à être à la fois époustouflant et déchirant...
Petit clin d'oeil à notre époque... Car... Oui... On est alors en 2015, et les chefs d'oeuvre naissent encore bel et bien... Il "suffit" de savoir les créer...
"Beauty", qui suit, permettra de se remettre en douceur de la magie précédente... La piste instrumentale est imprégnée de la touche du maître, de son atmosphère nappante et de sa guitare qui se lamente...
On finit avec "And Then...", la suite logique de l'introduction "5 A.M."... Dernier moment de grâce... A croire que le guitariste transforme en or tout ce qu'il touche, avec une aisance et une facilité qui ne peut que laisser admiratif... Tout en délicatesse et en finesse... Good Bye Sir Gilmour... On continuera à t'accompagner, à jamais... Et on n’a plus qu’à espérer que tu nous offres, un jour, un dernier sursaut…
TRACK LIST
- 01. 5 A.M.
- 02. Rattle That Lock
- 03. Faces of Stone
- 04. A Boat Lies Waiting
- 05. Dancing Right in Front of Me
- 06. In Any Tongue
- 07. Beauty
- 08. The Girl in the Yellow Dress
- 09. Today
- 10. And Then...