Emilie SIMON

3 étoilesEmilie Simon
5 étoilesLa Marche de l'Empereur
3,5 étoilesMue

Emilie SIMON
-
La Marche de l'Empereur

5 étoiles
Emilie SIMON - La Marche de l'Empereur

Musique de Film

Chronique publiée en Avril 2025


« La Marche de l'Empereur », sorti en 2005, est le deuxième album d'Émilie Simon. Il suit un premier recueil ayant montré des débuts très prometteurs et grâce auquel l'artiste s'était particulièrement fait remarquer. Vu les espoirs suscités par cet ainé, on imaginait accueillir un magistral petit frère... et autant y aller franchement : cette Marche de l'Empereur s'est imposée comme l'incontestable magnum opus de la musicienne. L'œuvre est complètement inédite et originale, voire même innovante... elle colle merveilleusement bien au documentaire du même nom, tout en constituant une véritable splendeur à écouter...

Son introduction, "The Frozen World", en dit déjà long sur ce qui suivra pendant tout le disque... On y trouve une bonne partie des caractéristiques qui serviront de fil conducteur : les nombreux petits bruitages, la présence d'instruments traditionnels (électriques ou classiques) mais aussi électroniques, l'assemblage très particulier, les échos savamment distillés, la merveilleuse voix de la chanteuse... et surtout... la Majesté ! La composition tout entière brille d'une lumière polaire prête à vous inonder jusqu'au bout du voyage... Une richesse et une beauté musicale à vous faire frissonner...
"The Egg" utilisera d'ailleurs plus tard une variation de ce premier morceau, en y installant un début énigmatique rempli de tapotements, cliquetis et minuscules pointes de danse, puis en lançant ses notes délicates... ses notes qui petit à petit vont faire ressurgir l'air principal en l'enrichissant d'une dimension épique additionnelle, étroitement liée à l'effort et la précision extrêmes déployés par les héros du film...

Le monde environnant se retrouve décrit dans "Antarctic" et "Song of the Sea". D'un côté, un continent rude, dangereux, à la force impressionnante et à la beauté mystérieuse... De l'autre la mer, indispensable à la vie... source de nourriture et de dangers, dépeinte dans une ambiance planante à la limite du mystique...
Enfin, "Song of the Storm" incarne le vent glacial qui lacèrent les corps, avec son tempo à la mesure de la rigueur de l'épreuve... Les cristaux de neige hostiles se projettent sur la bande, dans une tentative, heureusement en grande partie vaine, de pétrifier tout ce qui se présentera...

Les émotions transparaissent sur les scintillements d'"Aurora Australis", ainsi que sur "Baby Penguins" : le grand moment des premiers pas. La construction de ce morceau est toujours aussi singulière et profondément impressionniste. Les différents éléments se mettent en place par petites touches diffusées avec une rare intelligence, jusqu'à ce que la mélodie émerge et prenne son impeccable envol !
À l'opposé, la mort rôde sur "Attack of the Killer Birds" et "The Sea Leopard" : crainte, angoisse, peur et courage provoquent une course effrénée pour la survie, à la fin parfois macabre ("Mother's Pain")...

La fin de l'album est impressionnante de qualité... et c'est notamment là que se placent ses deux pistes les plus célèbres. Mais auparavant, petite étape par les passages chantés, "Footprints in the Snow", "Ice Girl" et bien sûr "All is White" en rappel énergique de "Baby Penguins".
"All is White" se démarque en particulier : Émilie Simon s'en donne à cœur joie et illumine littéralement ce mouvement par son interprétation... Un nouveau ravissement, en forme d'invitation au bonheur et à l'euphorie...

Et puis, les voilà, les titres iconiques : "The Voyage" et "To the Dancer on the Ice"...
Celui qui reflète le film par excellence reste "The Voyage"... C'est même son emblème de facto : il est le symbole de l'interminable déplacement des manchots empereurs, les accompagnant sans faille dans leur fabuleuse prouesse. L'ensemble aboutit à un morceau théâtral et majestueux, empreint de conviction et doté d'une envergure orchestrale évidente et grandiose... L'épopée sur le manteau de neige à perte de vue se transforme en un émerveillement... Un petit joyau niché au coeur de la banquise cristalline...
Enfin, le plus beau moment du disque : "To the Dancer on the Ice", un passage légèrement revisité du premier album de l'artiste. La réadaptation quasi instrumentale, avec petits bruitages et dynamique en hausse discrète, est tout simplement superbe en plus de s'ajuster parfaitement au thème représenté. Au milieu d'une nature immaculée, s'installent l'espoir et la paix... ainsi qu'une forme de mélancolie et de joie qui s'entremêlent dans une féérie de notes rendant l'instant totalement enchanteur. La pureté des harmonies, la justesse des sonorités et la magnificence du violon créent une authentique pièce de joaillerie, comme un diamant qui se fondrait dans le blanc de l'Antarctique... Le tout rayonne d'un soleil austral aveuglant d'inspiration...

Avec « La Marche de l'Empereur », Émilie Simon sort un chef-d’œuvre qui sera d'ailleurs largement récompensé, tant pour son admirable contenu que pour sa géniale personnification de l'aventure... Un disque phénomène, atypique et hors norme... Un enchevêtrement somptueux de petites pierres précieuses... Une Orfèvrerie d'Eau et de Glace...

TRACK LIST

  • 01. The Frozen World
  • 02. Antarctic
  • 03. The Egg
  • 04. Song of the Sea
  • 05. Baby Penguins
  • 06. Attack of the Killerbirds
  • 07. Aurora Australis
  • 08. The Sea Leopard
  • 09. Song of the Storm
  • 10. Mother’s Pain
  • 11. To the Dancers on the Ice
  • 12. All Is White
  • 13. The Voyage
  • 14. Footprints in the Snow
  • 15. Ice Girl