Voilà déjà quatre ans que Venus a apporté sa pierre à la reconstruction du Rock, via « Welcome to the Modern Dance Hall », un premier album original basé sur une approche acoustique tourmentée très réussie... Mais en 2003, pour la suite de l'aventure, le groupe procède à une étrange volte-face en nous proposant un « Vertigone » qui sonne pour le coup curieusement "traditionnel". En particulier, le côté un peu fiévreux de leur premier essai se retrouve ici brisé par de nombreuses orchestrations, qui donnent un résultat beaucoup plus lissé, limite conventionnel...
« Vertigone », c'est aussi l'occasion pour Venus d'accrocher un premier succès international, avec la sortie du single "Beautiful Days" ! Un single qui s'est d'ailleurs imposé sur la durée, étant régulièrement utilisé dans de nombreux films et publicités.
Alors... "Beautiful Days", c'est un beau morceau, c'est clair... Un air entraînant, une construction très propre, un refrain fédérateur, un message optimiste... Oui, c'est un beau morceau, qui a apporté à Venus une visibilité et un succès mérité !
Après, lorsqu'on connaît les débuts du groupe, il y a quand même de quoi être surpris... Le côté pop presque trop calibré, tellement en écart des fondamentaux du groupe, laisse quelque peu interrogatif...
Par ailleurs, Venus a le don de sortir des singles peu représentatifs des albums qui les hébergent... C'était déjà vrai sur leur premier opus avec "She's so Disco", et on en a un nouvel exemple ici... Après, c'est une remarque en passant... Tant mieux si ça leur a permis de se faire connaitre !
Bref, il ne s'agit pas de bouder son plaisir en écoutant "Beautiful Days"... Mais personnellement, nul doute que le reste de Vertigone m'intéresse effectivement beaucoup plus...
À part ce tube, que va-t-on alors retrouver dans « Vertigone » ? La première évidence, c'est que ce recueil est extrêmement varié : des passages minimalistes, des moments plus rock, quelques surprises, des envolées bien vues... Venus demeure effectivement un groupe éclectique aux idées multiples ! L'autre enseignement... c'est que l'album est bon, mais qu'il manque un peu d'âme. Autant c'est un disque que j'apprécie et que j'écoute régulièrement, autant je suis bien obligé de constater l'absence des différents sursauts épiques émaillant les autres albums du groupe.
"Million Miles Away", "Little Hotel" et "Big Waste Ground" sont de bons exemples que Venus ne parvient pas dans « Vertigone » à franchir les limites donnant accès à l'exceptionnel... Dans leurs autres opus, ce genre de style plus intimiste a régulièrement engendré d'authentiques petites perles ("Don't say you need love (I know you do)", "Underwater", "Unknown"...)... Ici c'est agréable et ça permet d'amener des moments d'émotions apaisés, mais le niveau est clairement un cran en dessous du reste de leurs œuvres.
Et puis, voici les chansons très caractéristiques du groupe : "Wanda Wulz", "Sand Dollar", "Vertigone" ou encore "Running at Full Speed" (et sa chorale invitée)... Constructions bien ficelées, créativité qui ne se dément pas et inspiration fertile aboutissent à ces compositions fort justement logées au cœur de leur discographie ! Toutes ces réalisations sont également le symbole d'un album qui, sans tutoyer les sommets, montre une qualité globale indéniable...
Enfin, mention spéciale aux pistes, intelligemment réparties dans tout l'album, qui parviennent malgré tout à se démarquer. "Happiness" est notamment une merveilleuse introduction : subtile, délicate, recherchée, tout en bénéficiant d'un final qui invite à imaginer le meilleur... Elle a le mérite d'admirablement lancer le disque !
"Daystar" possède quant à elle un côté enchanteur tellement naturel qu'il en devient désarmant... Tout en nappes qui s'attirent et s'assemblent pour un résultat délicieusement fascinant... D'autant plus que "Kallenovsky " enchaine immédiatement pour encore consolider ce milieu d'album de grande classe. Une chanson douce-amère, comme un scan de nos vies, en immersion dans une tristesse précieuse et envoûtante...
Finalement, "Navajo Dream", plus imposante, plus solennelle et plus cérémonielle, nous offre quatre minutes de perdition dans un monde à l'ensorcellement chamanique...
Pour conclure, « Vertigone » est donc quand même une fort belle proposition, qui s'apprécie dans son ensemble, avec des idées variées et un équilibre général évident... Mais c'est vrai aussi qu'on ne profite ici pas de l'étincelle supplémentaire présente sur les autres disques de Venus...
Reste que le groupe n'a heureusement pas dit son dernier mot. Trois ans plus tard, l'album testament, « The Red Room », va renouer avec l'ambiance des débuts et finalement consacrer leur style dans ce restera leur réussite la plus marquante et la plus essentielle...